NIGAY : « Nous sommes dans les temps »

L’EXPERT DU CARAMEL CONSTRUIT UNE UNITÉ DE PRODUCTION À NESLE. OUVERTURE PRÉVUE EN 2019 AVEC, À LA CLÉ, LA CRÉATION DE 15 EMPLOIS.

Entretien avec Monsieur Henri Nigay, Président et Directeur technique.

Début 2017, vous avez annoncé un programme d’investissements de 20 millions d’euros pour créer une unité de production de caramel industriel à Nesle. Peut-on faire le point sur l’avancée du chantier ?
H.N. Les travaux avancent bien et nous devrions ouvrir dans les temps, c’est-à-dire début 2019. Cette deuxième unité de production viendra en soutien de celle de Feur(42), complètement saturée. Nous avons comme objectif 15 000 tonnes/ an dans un premier temps, mais le site est dimensionné pour ouvrir différents ateliers en fonction de l’évolution du marché.

Vous aviez annoncé également la création d’une quinzaine d’emplois. Est-ce toujours à l’ordre du jour ?
H.N. Oui, nous avons déjà recruté notre directeur et nous sommes à la recherche de personnes ayant déjà une première expérience dans l’industrie agroalimentaire. Il n’y a pas d’école de fabrication du caramel en France vous savez, donc le support technique, la formation est une dimension importante de notre développement. Des collaborateurs de Feurs viendront nous aider dans la phase de démarrage.

Outre la position stratégique de Nesle, quels sont les éléments qui ont emporté votre décision ?
H.N. Vous avez raison de souligner l’implantation géographique. Nous avons visité des dizaines de sites en France et même prospecté à l’étranger. Bien sûr, la proximité des ports d’Anvers et Rotterdam est un atout pour une entreprise comme la nôtre qui réalise une part importante de son chiffre d’affaires à l’exportation. Et le canal Seine-Nord Europe constitue, de ce point de vue, la cerise sur le gâteau : nous pourrons remplacer à terme les camions par les péniches et ainsi réduire notre empreinte carbone. La logistique n’est pas négligeable non plus : nous nous situons au cœur de la plus grande région productrice de sucre en France ; sur un rayon de 100 km on trouve ici pas moins de 8 sucreries et 4 glucoseries. Mais aujourd’hui, notre atout principal c’est l’optimisation des ressources, c’est-à-dire toutes les synergies industrielles que nous pouvons construire. Ainsi, nous avons un partenariat renforcé avec l’entreprise Tereos : elle acheminera les matières premières directement par tuyauterie, elle nous fournira en énergie (vapeur d’eau) et traitera nos effluents grâce à sa station d’épuration. Mais nous restons 100% indépendants.

Justement, comment pouvez-vous garantir cette indépendance ?
H.N. Nous sommes une entreprise familiale. Cinq générations se sont succédés chez Nigay pour contribuer à son succès ; et la sixième génération fait son entrée. Au début des années 80, nous réalisions 2% de notre chiffre d’affaires à l’exportation, autant dire que c’était confidentiel et plutôt passif, des amis chefs d’entreprises à l’étranger emportaient notre caramel dans leurs valises pour le faire connaître ; mon frère a développé ce secteur et nous avons progressé jusqu’à 62% en 2017. Nous choisissons des partenaires qui partagent nos valeurs. Ce qui nous intéresse c’est l’implantation dans la vie locale, un territoire, un terroir. Ainsi, dès la phase initiale du projet, nous avons pris contact avec Agrosphères, c’est un réseau précieux, et nous sommes partis à la rencontre des élus locaux qui nous ont toujours très bien accueillis.

Ces valeurs que vous défendez, quelles sont-elles ?
H.N. Nous distribuons très peu de dividendes. Notre vocation, ce n’est pas la rentabilité immédiate  ; nous sommes des industriels, ce qui nous intéresse c’est l’amélioration constante de nos produits et la satisfaction du client. Cette philosophie nous la développons à tous les niveaux  : en interne, nous avons un programme ambitieux de qualité de vie au travail ; en externe, nous sommes particulièrement sensibles aux aspects de développement durable.

Donc pour vous, tous les voyants sont au vert ?
H.N. Nous sommes prudents. Nous sommes en phase de croissance et il nous faut l’assurer en équilibre avec nos deux sites. Ensuite, tout dépendra de l’évolution du marché. La société fait la chasse au sucre, certaines molécules ont été prises pour cible dans la presse, le caramel n’est pas épargné. Mais ce qui nous préoccupe le plus aujourd’hui, ce sont les évolutions réglementaires  : avec la suppression des quotas sucriers, nous passons d’un secteur ultra-protégé à l’ultralibéralisme avec le risque d’avoir des variations de prix difficilement gérables. Nous ne pouvons pas passer notre temps à négocier avec des clients qui s’affolent quand les prix montent et demandent à ne pas être pénalisés ou bien qui exigent, lorsque les prix baissent, leur « part du gâteau ». Nous sommes des industriels, pas des spéculateurs.

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